Point de vue d’experts Julien Anselme, Président du Pôle de compétitivité ENTER « Faire du numérique responsable un levier de progrès, pas une contrainte » Directeur Innovation au sein du groupe Orange en Nouvelle-Aquitaine et président du Pôle de compétitivité ENTER, Julien Anselme incarne cette nouvelle génération d’experts qui veulent faire rimer innovation technologique et responsabilité. Rencontré à l’occasion du salon INNN, lors duquel le pôle figurait parmi les exposants, il partage son regard sur les grandes transitions à l’œuvre dans le numérique et sur la place essentielle du territoire dans leur concrétisation. « ENTER est un pôle à mission – le seul en France sur le numérique responsable, rappelle d’emblée Julien Anselme. Nous avons été créés en juillet dernier et opérationnels depuis janvier. Nous sommes jeunes, mais notre raison d’être s’ancre dans des enjeux qui, eux, sont fondamentaux. » Pour le président du pôle, le numérique responsable ne se limite pas à une démarche environnementale : il recouvre une vision globale, systémique. « Il y a des sujets déjà bien identifiés : le recyclage, la frugalité énergétique, l’inclusion numérique sur lesquels nous continuons d’avancer. Mais il y a aussi de nouveaux défis à relever : la souveraineté, la sécurité, la donnée, l’intelligence artificielle. » Dans une approche très concrète, ENTER a choisi de structurer ses travaux autour de groupes thématiques qui croisent ces enjeux : santé, risques climatiques, IA souveraines, infrastructures, ou encore open source. Julien Anselme illustre : « Le réchauffement climatique, par exemple, est une réalité qui a un impact direct sur les infrastructures numériques. L’été dernier, certains data centers ont dû s’arrêter car leurs systèmes de refroidissement n’étaient plus efficients au-delà de 40 degrés. Cela montre à quel point les enjeux techniques, environnementaux, assurantiels et financiers sont interconnectés. » Face à ces chaînes de risques, le pôle a un rôle clé : mettre les acteurs autour de la table, favoriser les collaborations et mobiliser des financements européens pour expérimenter des solutions concrètes. « C’est là que le pôle fait sens : en créant un espace de dialogue et d’action entre industriels, chercheurs et collectivités. » Du numérique responsable à la valeur partagée Pour Julien Anselme, la transformation numérique responsable ne se décrète pas ; elle se conçoit. «Le numérique responsable, c’est une évolution plus qu’une révolution. Il doit être intégré dès la genèse d’un projet, pas ajouté a posteriori. On ne peut pas construire un service numérique sans se demander où il sera hébergé, quelle énergie il consommera, ou quelle empreinte auront les images qu’on y met. » Au sein du Pôle ENTER, cette conviction se traduit par un accompagnement pragmatique, chaque entreprise adhérente réalise deux diagnostics, un diagnostic cybersécurité et un diagnostic numérique responsable. L’objectif ? Pas de sanction, mais de la montée en compétence. « On ne juge pas, on aide. On part du niveau de maturité réel pour accompagner la progression. Et surtout, on martèle un message essentiel : le numérique responsable ne doit jamais devenir une contrainte économique. S’il est perçu comme une obligation, les entreprises s’en détourneront. Il faut le positionner comme un levier de compétitivité, un moteur d’innovation et de valeur. » Une dynamique collective à l’échelle du territoire ENTER se revendique comme un pôle national à ancrage territorial fort. «Nous ne sommes pas centrés sur Bordeaux, insiste Julien Anselme. Notre mission, c’est d’être présents sur tous les territoires : N iort, Poitiers, La Rochelle, Limoges, le sud de l’Aquitaine… Nous voulons travailler au plus près des entreprises locales, et les technopoles comme Altæ sont des partenaires naturels pour cela. » Son ambition est claire : créer un effet de capillarité, une pédagogie partagée. «Plus nous aurons d’adhérents, plus notre légitimité grandira. Ce n’est pas seulement une question de financement, mais de crédibilité. Chaque adhérent, c’est une preuve que le numérique responsable n’est pas une utopie, mais une réalité qui s’organise. » Et lorsqu’on lui demande de résumer en un mot son expérience au INNN, il hésite un instant avant de sourire : «Convivial. C’est sans doute le mot le plus juste. Derrière les débats techniques, c’est avant tout un salon humain, ancré dans le territoire, qui donne envie de continuer à faire ensemble. » Regardez la table-ronde Regardez la table-ronde Les grands thèmes